mardi 23 mars 2010

En lisant René Welter

Pierre Soulages
En lisant René Welter
Imaginons ceci : une musique sans appoggiatures , une peinture faite de prédelles et une voix jouxtant le silence. Cela donne à peu près une image de la poésie de René Welter. Chez lui, Le beau ne relève donc pas de l’ajout fait à la nature mais il est plutôt le fruit d’une soustraction. C’est une poésie qui semble exiger une grande part de blanc, un pan de silence. Tout se passe comme si le poète misait sur l’illisible. Le poème est comme le vide indispensable à l’écho.
Naguère je rattachai la poésie de Laurent Fels , qui est dans la même veine que celle de René Welter, à l’univers cistercien. Je reprends aujourd’hui ce rapprochement en précisant que l’écriture de Welter est drue – je pense à Paul Celan, affûtée comme l’est la poésie de Charles Juliet. C’est la poésie d’un homme qui semble marqué par la distance et toutes les questions ontologiques dont résulte cette intranquillité de l’être qui se lit partout chez lui :
des pierres dressées
sur les dormeurs

sans visage
une allée
de platanes
au bout
du glacis
une rose
sans nom
dépose
pour la flamme
et le charbon

René Welter : Feuillets de plomb. Collection G.R.A.P.H.I.T.I éditions PHI Luxembourg 2009

2 commentaires:

giulio a dit…

Voici ma modeste contribuconfirmation à ce que tu écris, cher Jalel, extraite de ma présentation du 28.3.2009 de «Feuillets de plomb» suivi de «À main courante» :

"... les non-dits l’auteur ont du bon: ils ne nous imposent rien, enfin, presque. C’est, que le non-dit, le blanc donc, me semble essentiel dans ce genre de poésie, et plus encore dans celle de Welter que chez d’autres contemporains. N’écrivait-il pas déjà dans son recueil «Un mot à la limite» paru aux Éditions En Forêt en 2004: «tu laisseras deux pages / dans le carnet à blanc / qui saura plus loin / que nous répondre / des mots à bout / portant réponse / à l’invisible». Et, en effet, loin de constituer des lacunes, les blancs de René Welter représentent justement avec ses non-dits la part de liberté laissée (volontairement) au lecteur et (nécessairement) au futur. C’est aussi un peu – toute comparaison boîte, bien sûr – comme si le poète vous donnait le «la», la direction à suivre et ensuite quelques rares jalons, pour vous laisser poétiser quasiment à votre guise le long d’un chemin à peine balisé."
.

Jalel El Gharbi a dit…

Merci cher Giulio